À une époque où les images sont nombreuses et souvent bavardes, je découpe et déchire des papiers de toutes natures, tantôt lisses ou grainés, parfois bruts, abîmés ou tachés. Je compose, agence et assemble selon une mécanique singulière à défaire les images en usant de différentes techniques plastiques.
J’appréhende le collage non simplement comme une technique de découpage ou de citation, mais davantage comme un état d’esprit créatif et disruptif.
Chaque collage est une sorte de corps à corps avec la matière et la couleur, engendrant par la recomposition d’éléments hétérogènes, la création d’une réalité singulière et l’émergence de sensations et réflexions multiples. Et quand l’aspect décoratif ou anecdotique de certains éléments sont détournés au profit de leurs qualités plastiques et des signes qu’ils proposent à reconsidérer, le collage est aussi envisagé comme une forme de détournement.
Contre les images trop lisses, numériques, consuméristes, puritaines ou porno chic, je fais des images contre les images sur le mode d’une répétition sans pléonasme marquée par un questionnement des stéréotypes et une mise en doute des représentations, mais aussi comme un recyclage, afin de redonner sens aux rebuts, aux détritus, aux déchets imprimés de toutes sortes et laissés dans les marges, aux images éphémères des magazines, des affiches et des journaux jetables.
Le collage permet tout particulièrement au sens des images de se transformer et cette transformation apprend souvent quelque chose sur la société et sur soi-même. Parce que les images façonnent en grande partie la réalité de chacun, le collage est ici appréhendé comme une tentative de modifier la mécanique de son regard sur les choses et de façonner sa propre réalité en donnant chair imagée à ce qui n’est pas de l’ordre du visuel, comme les sensations et les émotions qui leurs sont liées.
Découper, associer des fragments, composer la réalité pour la transformer, détourner des messages, révéler une époque à rebours du mainstream sont autant de gestes qui caractérisent bien des œuvres de la décennie 2010.
Je coupe, j’assemble, je peins et je colle avec la volonté de faire un pas de côté et le désir de voir plus vif.
Ce site peut utiliser des cookies et des scripts externes. Plus d'informations